De la nécessité d’un Etat Africain fort et puissant

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Par Yemele Fometio

C’est devenu un fait banal dans le monde actuellement. Quand nous ouvrons notre poste récepteur radiophonique, notre téléviseur ou quand nous ouvrons les pages de notre journal écrit, dans les réseaux sociaux ou sur internet, les mêmes informations reviennent : Des noirs morts en méditerranée essayant de gagner l’Europe, des filles noires violées et torturées dans les Etats arabes, des noirs fusillés par la police des Etats-Unis. Dans tel pays africain, la police vient de tirer sur des manifestants désarmés faisant des centaines de victimes, tel dirigeant africain nationaliste vient d’être renversé par coup d’Etat, tel éboulement à Haïti vient de faire des milliers de victimes, la famine et les pandémies menacent tel Etat noir… Vu tous ces problèmes, certains ont parlé de la malédiction nègre. D’autres ont parlé de la haine des autres contre les noirs.

La vérité c’est que le noir ne peut pas être respecté dans le monde sans qu’il y ait une puissance noire forte qui inspire la crainte. Le monde évolue ainsi. Il n’y a pas de place pour les pleurnichards et ceux qui veulent inspirer la pitié. Les textes sur les droits de l’homme, l’égalité de tous les hommes sont de simples discours qui sont vains devant la réalité. Il n’y a pas d’égalité entre un mendiant et celui qui lui donne à manger malgré tous les textes sur l’égalité. Il ne peut avoir égalité entre un pays qui possède des drones militaires, des armes à destruction massive, des industries, des bombes et un autre pays qui peine à se nourrir et qui possède tout au plus quelques kalachnikov achetés à l’étranger. Les noirs ne trouveront jamais la paix dans le monde tant qu’un Etat noir n’aurait émergé, radical, surarmé, inspirant de la crainte et dans un élan rebelle comme celui de la Corée du Nord, soit capable de frapper, de bombarder partout où besoin sera pour sauvegarder les intérêts de tous les noirs. Seul un tel Etat peut faire que partout dans le monde les noirs se sentent en sécurité. Si le Chinois est respecté partout dans le monde, ce n’est pas parce qu’il est chinois. C’est parce que derrière lui on voit l’Etat chinois puissant disposant de bombes nucléaires et d’un droit de véto aux Nations Unis. Pareil pour un français, un anglais et un étasunien pour ne citer que ces deux cas. Et si les noirs et les arabes sont encore les plus marginalisés dans le monde, c’est justement parce que de telles puissances leur manquent. Dans le cas des noirs, la situation est encore plus drastique. La première puissance africaine actuelle le Nigéria est l’allié inconditionné du bloc occidental et son économie est très extravertie. En rapatriant les rebelles camerounais du Nigéria en 2017 pour qu’ils soient jugés au Cameroun, le Nigéria témoignait son irresponsabilité à être un pays sur lequel les noirs du monde entier peuvent compter et s’identifier. Nous n’encourageons pas ici le mouvement sécessionniste au Cameroun, mais ses dirigeants se sentant menacés au Cameroun ont fui le pays pour se réfugier à l’étranger. Ils se sont retrouvés au Nigéria pour tenir une réunion de restructuration de leur lutte. Ils ont été interpellés par les autorités nigérianes et rapatriés au Cameroun. Ils avaient droits à la protection internationale. Ces faits font que les noirs du monde entier ne se reconnaissent pas dans la République du Nigéria. C’était pareil pour la République Sud-africaine qui a été pendant longtemps la première puissance économique africaine. Bien que dirigée par les noirs, les autres noirs du monde entier la trouvent très blanche dans la prise des décisions. Des scènes de xénophobie contre les ressortissants des autres pays africains n’améliorent pas l’Afrique du Sud comme repère et modèle. L’Angola bien qu’armé ne parvient pas à fédérer tous les noirs du monde entier. Le Zimbabwe pendant longtemps a fait la fierté des noirs, mais les noirs étaient informés du pays par les médias occidentaux qui ne sont jamais sincères quand il s’agit d’un mouvement nationaliste en Afrique. Ce que nous voulons insinuer c’est  que l’Afrique n’a pas de référence en termes d’un pays fort, solidaire envers les noirs du monde entier. Au contraire, les scènes de rapatriement des noirs ressortissants des autres pays africains découragent les africains. Le noir africain est donc seul et il sait qu’il est seul. En cas d’agression, il sait qu’aucun pays noir ne le soutiendra. Il va subir. Quand un Etat noir est agressé, il sait qu’il ne peut pas recevoir de l’aide considérable des autres Etats noirs. La plupart de temps, ses soutiens sont étrangers (Cuba, Russie…) Il ne faut certes pas sous-estimer les soutiens secrets des Etats noirs et aussi ceux plus ouverts des pays comme le Ghana de Kwame Nkrumah, ou la Guinée de Sékou Toure ou l’Angola de Dos Santos. Ce que nous voulons insinuer c’est que les noirs et les Etats noirs se sentent seuls et les autres pays du monde sont conscients de cette solitude. En torturant les noirs, ils savent qu’aucune puissance noire ne se lèvera pour revendiquer. C’est pour cela que la torture et l’assassinat des noirs dans le monde est légion. Quand 3 français sont tués, le monde s’active, mais des milliers de noirs assassinés n’émeuvent personne. Tout au plus quelques mouvements de gauche dans le monde s’y penchent pendant quelques temps et tout est finis. Tout se passe dans le monde comme si un blanc valait plus de 100 000 noirs. Les assassinats des noirs qui essaient d’émouvoir le monde sont ceux estimés aux centaines de milliers. La raison est simple : L’absence d’une puissance noire capable de défendre les noirs du monde entier. Si l’Egypte pharaonique a tenu pendant plus de 15 000 ans au sommet du monde, c’est parce que les égyptiens étaient conscients que s’ils étaient en difficulté, ils pouvaient à tout moment compter sur les deux autres Etats noirs les plus proches d’eux (Ethiopie et Phénicie). Actuellement la situation est autre. Un Etat noir agressé se défend seul. Il peut tout au plus attendre le soutien des pays socialistes européens ou asiatiques. Quand la Côte d’Ivoire était agressée en 2010, elle n’a pas eu un soutien militaire d’un pays noir. Au contraire les autres Etats noirs sont restés très muets et ont assisté à l’égorgement de la Côte d’Ivoire. Le cas de la Côte d’Ivoire n’est qu’un cas parmi des milliers d’autres. C’est ce qui freine la prise de conscience noire.

La prise de conscience s’appuie sur des actes, sur l’espoir. Une prise de conscience noire n’est pas possible sans la naissance de l’espoir : espoir de construction d’une arrière base solide, espoir de construction d’un Etat nègre fort capable de défendre les noirs partout dans le monde entier sans exception, espoir d’un Etat qui améliore de manière positive et radicale les conditions de vie des noirs. Cet espoir se construit par des leaders et par les évènements et en particulier les victoires. Les victoires sont déterminantes dans la prise de conscience d’un peuple. Les Etats  noirs sont faibles et les noirs très peu combatifs. Ils ne connaissent pas leurs grandes victoires passées et  les victoires actuelles sont rares. La chute de Laurent Gbagbo en 2011 a été un choc  pour la conscience noire. L’assassinat des leaders noirs qui inspirent confiance (Lumumba, Sankara, Sylvanus Olympîo…) sont autant de faits qui freinent la conscience noire par le découragement qu’ils instaurent. La victoire d’un Etat noire sur les Etats Unis d’Amérique par exemple aura pour incidence directe un grand bond en avant de la conscience nègre. Un tel évènement réveillera des forces nègres insoupçonnées. Les historiens ont parlé à raison de réveil du nationalisme. Parce que le nationalisme est présent chez tous les peuples, mais de manière dormante. Il n’y a pas un peuple fondamentalement plus nationaliste et plus patriote qu’un autre. Il y a des leaders et des évènements qui, soient endorment le nationalisme d’un peuple, soit le réveillent. Le peuple français qui fait la révolution en 1789 n’est pas plus nationaliste que le peuple camerounais actuel. Il y a des leaders et des évènements qui réveillent le nationalisme français et qui freinent celui du Cameroun actuel.

Dans les Etats noirs, plusieurs évènements se sont multipliés pour réveiller la conscience nègre. Ce sont des Etats en qui les noirs à une période de leur histoire se sont reconnus avec enthousiasme. Ils ont fait du destin de ces Etats leur propre destin. Ils se sont reconnus dans les combats que menaient ces pays. Le premier de ces Etats est Haïti. Depuis la chute des grands empires africains, Haïti est le premier Etat qui réveille la conscience noire et qui donne aux noirs du monde entier une grande fierté. Le 18 Novembre 1803, la nouvelle tombe : la France de Napoléon vient d’être battue militairement à Saint Domingue par une armée d’esclaves organisée autour des leaders comme Jean Jacques Dessalines, alors que Napoléon vient de soumettre presque toute l’Europe et une partie considérable de l’Amérique. Cette victoire accroit la conscience noire. Partout dans les plantations, les esclaves noirs s’organisent et affligent des défaites aux négriers. Les esclavagistes sont obligés d’abolir l’esclavage et de libérer les esclaves noirs. Toussaint Louverture et ses camarades, par leur victoire, avaient planté le poignard au cœur de la traite négrière. Le plus important n’a pas été leur victoire, mais les forces nègres que cette victoire a réveillées par l’éveil de conscience. Haïti n’était pas seulement un modèle, mais le territoire sur lequel on pouvait compter et sur lequel on pouvait facilement se replier en cas de difficulté. Haïti n’était pas pour les noirs un pays des haïtiens, mais un pays des noirs du monde entier. Sa seule existence montrait aux esclaves que le système peut être vaincu et les renforçait dans leur combat. Les noirs du monde entier pouvaient regarder les autres races en face puisqu’ils se reconnaissaient dans cette victoire de Saint Domingue. Les autres les regardaient avec plus de respect. Derrière chaque noir, on voyait Toussaint Louverture et Dessalines combattants, on voyait des plantations dévastées, des blancs tués, des colères incontrôlées libérées, en quelque sorte des sauvages armées fonçant avec leurs tas de muscles. La considération qu’on avait du noir se trouva fondamentalement modifiée par cette victoire. Même si on continuait à le mépriser, il n’était plus cette femme qu’on viole impunément, cet homme qu’on attache au poteau et qu’on fouette jusqu’à la mort impunément ou cet homme qu’on enterre vivant la tête dehors, avec lequel on nourrit les chiens. Haïti avait imposé une autre considération du noir.

Le deuxième Etat noir qui fait des avancées considérables dans la conscience nègre est l’Ethiopie de Menelik II et une fois de plus Haïti. En 1896, les forces italiennes venues pour coloniser l’Ethiopie sont vaincues par les armées de Menelik II roi d’Ethiopie. L’Italie est obligée de reconnaitre l’indépendance de l’Ethiopie. Depuis que l’Europe a commencé sa pénétration dans le continent africain, elle a vaincu tour à tour toutes les résistances. La défaite italienne montrait aux noirs du monde entier que les colons peuvent être vaincus. Cette victoire n’a pas eu beaucoup d’incidence sur la conscience nègre à cause du manque de communication sur elle. Mais elle était déjà une faille dans le système colonial. La colonisation démarrait avec un grand handicap. Elle démarrait avec un caillou bien gênant dans sa chaussure. Et ce caillou était la victoire éthiopienne sur l’Italie. Haïti une fois de plus échappe à la colonisation. Au XIXe siècle, l’Europe se lance à la conquête du monde. Haïti est le champ de plusieurs convoitises, mais le pays échappe à la colonisation. Haïti libre était encore un repère pour les noirs, un véritable arrière base pour les mouvements indépendantistes d’Amérique latine et centrale et un grand élément pour accroitre la conscience noire.

Le troisième élément est la deuxième guerre mondiale. Pendant la guerre, les colons sont momentanément vaincus par l’Allemagne nazis. Pour se libérer, ils sont obligés de faire appel aux colonisés. Dans toutes les colonies, les noirs sont sollicités pour libérer les pays colonisateurs. Ils se donnent entièrement à cette libération. Aux fronts, ils sont envoyés aux premières lignes. Ils luttent avec acharnement. Jusque-là, l’assassinat d’un blanc dans les colonies était l’un des pires crimes qu’un noir puisse commettre. Au front, on félicite le noir qui tue plusieurs blancs ennemis. Les colons étaient considérés dans les colonies comme des êtres suprêmes. Ils exigeaient des noirs une entière soumission. Au front, le mythe de la toute-puissance du noir est brisé. Les noirs découvrent qu’il n’y a pas de différence entre les blancs et eux : ces blancs meurent quand on tire sur eux, pleurent quand tue leurs amis, fuient la mort… Les noirs rentrent de la guerre avec un grand bond en avant dans les consciences. Dans les colonies, ils racontent les événements de la guerre et la découverte qu’ils ont faite sur leurs colons. Les colonisés deviennent orgueilleux envers les colons et refusent désormais de se plier à certains de leurs caprices. Ils se préparent à chasser cet étranger qui n’est différent d’eux que par son teint. Malgré le fait que les colons leur traite de tirailleurs (ceux qui tirent ailleurs) pour sous-estimer leur action dans la libération, les noirs refusent le mythe de race inférieure que le colon a voulu leur imposer et se préparent à l’action.

Le qyatrième évènement est la guerre d’indépendance du Cameroun. Alors que jusque-là le mythe du blanc tout puissant pesait encore sur les colonisés noirs du monde entier, aucune colonie noire n’avait eu le courage d’’affronter militairement les colons. Il y a eu certes la révolte des Hereros, celle des Mau Mau ou des Bayas, mais ces révoltes étaient des réactions tribales contre l’oppression. Mais les camerounais ont engagé une véritable épreuve de force contre la France pour revendiquer l’indépendance du pays. Le Vietnam avait déjà vaincu la France et l’Algérie avait engagé sa guerre d’indépendance en 1954. Dans les Etats noirs, les leaders étaient plus des collaborateurs du colon et n’étaient pas prêts à l’affronter militairement. En 1955, le Cameroun est obligé de prendre les armes pour combattre la France et arracher sa liberté. Aux yeux des autres colonies, l’action du Cameroun est de la folie et l’Union des Populations du Cameroun qui mène cette guerre  sera vaincue très rapidement. Mais malgré les interventions françaises qui se multiplient, les tortures, les bombardements, les assassinats de populations, la fusillade des populations, l’U.P.C. tient fermement. Cette guerre fait comprendre aux noirs du monde entier que les colons, et en particulier la France ne sont pas aussi forts qu’ils avaient laissés penser. La pression allait se faire plus forte contre la France pour revendiquer les indépendances. Quelques années plus tard, plusieurs Etats noirs prennent des armes pour combattre leurs colons : Zimbabwe, Guinée Bissau et Cap vert, Angola… 

Le cinquième évènement est la proclamation de l’indépendance du Ghana. Alors que presque tous les Etats noirs sont encore colonisés, une première indépendance devait avoir une incidence déterminante sur la conscience noire. Cette première indépendance est venue du Ghana en 1957. Kwame Nkrumah, qui avait déjà un passé bien connu en tant que théoricien et défenseur du panafricanisme proclame cette indépendance du Ghana et devient le premier président. Cette indépendance ne pouvait passer inaperçue dans le monde noir, d’autant plus que Kwame Nkrumah affirme que cette indépendance n’aura pas de sens si toute l’Afrique n’est pas libérée et qu’il s’engage à contribuer à cette libération du continent.

Le sixième évènement est l’indépendance de la Guinée Conakry. Pour que les pays d’Afrique noire francophone se libèrent, il fallait un « Non » à la Communauté Franco-Africaine du général français De Gaulle. Ce « Non » est venu de la Guinée Conakry d’Ahmed Sékou Touré. Ce refus de la Guinée Conakry à suffisamment lézardé les murs du colonialisme français pour que d’autres pays puissent multiplier des pressions sur la France et arracher leurs indépendances.

Pour que les noirs du monde entier puissent vivre dignement et être respectés, il faut un Etat noir fort et puissant qui en même temps protège tous les noirs du monde entier, mais aussi accroit la conscience noire. Il n’y a pas de progrès sans prise de conscience, et pas de prise de conscience sans espoir. Le décollage de l’Afrique viendra d’un Etat fort capable de protéger tous les africains du monde entier. Cet Etat, qui ne sera pas seulement noir (nous avons pris le cas des noirs juste parce que c’est la race la plus piétinée de la planète) est la République de Fusion Africaine que nous construisons à travers notre mouvement la Ligue Associative Africaine. Cet Etat se construira suite à la victoire de la Grande Révolution Panafricaine. La LIMARA (Ligue des Masses Révolutionnaires Africaines) accomplira la première étape vers cet Etat en prenant le pouvoir au Cameroun qui deviendra dès notre prise de pouvoir la République Fédérale du Nyobeland.